Un récent rescrit, BOI-RES-TVA-000140, publié le 14 février 2024, a apporté des éclaircissements sur la qualification des opérations impliquant des jetons non fongibles, communément appelés « NFT », en matière de TVA.
Alors que l’année 2023 a marqué une réglementation accrue, les NFT étaient jusqu’alors écartés de ces textes.
Cette réponse du Bulletin officiel des finances publiques (BOFIP) se distingue en étant la première à aborder les NFT dans un texte officiel, reconnaissant ainsi la qualification de jeton non fongible. La Direction générale des finances publiques (DGFIP) rappelle des éléments déjà connus des opérateurs, ajoutant une sécurité juridique au secteur et informant les acteurs que la TVA s’applique à ce domaine.
Le BOFIP rappel la définition des NFT :
Les jetons non fongibles (JNF), communément dénommés « NFT » en lien avec l’appellation anglaise « non fungible tokens », sont des fichiers informatiques uniques, créés et stockés sur un registre numérique de suivi de transactions dénommé « chaîne de blocs » (« blockchain »).
Si le recours à cette technologie peut intervenir dans des situations extrêmement variées, les JNF constituent souvent des certificats numériques attestant de la propriété d’un bien matériel ou immatériel.
En ce qui concerne le régime de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) applicable aux jetons non fongibles (NFT), le BOFIP énonce une approche générale et propose trois exemples d’applications.
1/ Approche générale en matière de TVA pour les opérations impliquant des NFT
Les NFT ne sont soumis à aucun dispositif spécifique de TVA, les principes standards de TVA s’appliquent.
Lorsqu’un NFT est utilisé comme certificat de propriété, la transaction concerne le bien ou service auquel il se rapporte. La règle est donc de se concentrer sur le sous-jacent adossé au NFT et d’appliquer les règles de TVA de droit commun, comme si aucun recours à un NFT n’avait eu lieu.
Les NFT ne sont pas assimilés aux crypto-actifs, que sont les jetons de paiement, les jetons d’utilité ou d’usage et les jetons d’investissement, et de fait ne relèvent pas des opérations bancaires ou financières exonérées de TVA.
2/ Exemples de qualification TVA pour certaines opérations avec des NFT
2.1. Création et vente de cartes numériques de collection associées à des NFT
Une société crée et vend des cartes numériques à collectionner liées à des NFT. Les clients peuvent stocker, revendre ou utiliser ces cartes, générant une rémunération basée sur la qualité et la rareté.
L’opération sous-jacente de fourniture de cartes numériques détermine le régime de TVA applicable. Les cartes numériques, ne constituant pas des biens corporels, qualifient les opérations de transfert de droits attachés à ces cartes comme des prestations de services, soumises au taux normal de TVA. L’émission automatisée des cartes peut également qualifier le service comme une prestation de services électronique.
Quoi qu’il en soit, le NFT généré pour chaque carte est un moyen de transaction et non un service distinct de celui portant sur le sous-jacent, la carte numérique.
2.2. Création et vente d’œuvres graphiques numériques associées à des NFT
Un artiste numérique crée et vend des œuvres graphiques exclusivement numériques, associées à des NFT.
La cession de ces œuvres graphiques numériques détermine le régime de TVA applicable à l’opération de l’artiste. Étant donné que ces œuvres ne sont pas des biens corporels, le transfert de droits est considéré comme une prestation de services.
Les cessions d’images numériques associées à un NFT sont soumises au taux normal de 20 % de la TVA.
Un taux réduit pourrait-il être applicable ?
Les compositions créées par l’artiste via des procédés informatiques et non entièrement exécutées à la main ne bénéficient pas du taux réduit de 5,5 % de la TVA.
Cependant, si les œuvres graphiques répondent aux critères de qualification d’«œuvres de l’esprit» et que chaque cession s’accompagne de la cession des droits d’auteur, le taux réduit de 10 % peut s’appliquer.
2.3. Financement d’un jeu vidéo en cours de création par l’émission de NFT
Une société vend des objets numériques représentant des éléments du jeu, associés à des NFT pour financer la création d’un jeu vidéo.
Les ventes d’objets numériques pour financer la conception du jeu ne sont pas soumises à la TVA lors de l’opération de financement.
Cependant, une fois le jeu réalisé et mis en service, les accessoires associés aux NFT deviennent imposables à la TVA au moment de la mise à disposition du jeu.
La mise à disposition est considérée comme une prestation de services, avec une base d’imposition équivalente à la contrepartie obtenue lors de l’émission des NFT, diminuée de la TVA.
Toute commercialisation ultérieure d’éléments du jeu via un NFT sera soumise à la TVA en tant qu’opération à titre onéreux.
Le rescrit mérite d’être souligné, fixant et rendant opposable la position de l’administration. Il rappelle également que, pour les besoins de la TVA, le secteur des cryptoactifs n’est pas si différent des autres secteurs tels que la technologie et la finance.
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En tant que juriste et fondatrice d’ARLY, je partage des informations sur les enjeux juridiques et comptables du Web3. À travers ARLY, mon objectif est de rendre le Web3 accessible aux professionnels du droit et du chiffre.